samedi 19 novembre 2016

"Mes 36 voeux à Patrick Rimbert, maire de Nantes. Avec sa réponse et d'abord une présentation par Thierry Guidet dans la revue Place Publique.

Patrick Rimbert a été maire de Nantes lorsque Jean-Marc Ayrault a démissionné de cette fonction pour devenir Premier ministre, soit du 29 juin 2012 au 4 avril 2014 (élection de Johanna Roland).







Mes 36 vœux à Patrick Rimbert, maire de Nantes

Publié le 31/01/2013



http://lucky.blog.lemonde.fr/2013/01/31/mes-36-voeux-a-patrick-rimbert-maire-de-nantes/#comments*




Mes 36 vœux à Patrick Rimbert, maire de Nantes

Sommaire :
01 – Étudier une sortie de crise viable pour Notre-Dame-des-Landes (l’option nazairienne)
02 – Un bagad pour une musique municipale
03 – Des cérémonies patriotiques non désertées
04 – Un temple laïc dédié à la Résistance et aux idéaux de Liberté-Egalité-Fraternité
05 – Une parade annuelle de toutes les communautés culturelles de Nantes
06 – La reconnaissance de la mémoire historique de la Droite nantaise
07 – Une rue du général de la Bollardière
08 – La dignité des mairies annexes
09 – Des statues des enfants nantais Jacques Vaché et Fernand Pelloutier
10 – Le rôle politique d’une ville Compagnon de la Libération
11 – Favoriser les rencontres entre les Jeunes et les Anciens
12 – Renforcer la lecture de la presse locale au collège et au lycée par des jeux scolaires proposés chaque matin
13 – Célébrer le Centre du monde, le centre des terres émergées
14 – Avoir le souci des usagers de Nantes résidant en zone périurbaine
15 – Usages modernes des transports en commun (1) : multiplier les voies tram-train en étoile.
16 – Usages modernes des transports en commun (2) : Multiplier les modes de transports (pont-transbordeur, téléphérique, navibus, draisienne) et les points d’accès (une escale du Navibus à Chantenay)
17 – Usages modernes des transports en commun (3) : Promouvoir la condition d’usager par des cadeaux inopinés dans les plate-formes, des animations-dégustations, des invitations à des avant-premières
18 – Usages modernes des transports en commun (4) : Faire accéder les lycéens les plus modestes à des tarifs adaptés
19 – Favoriser un nouvel usage des cafés et bistrots : le casier-bureau « baise en ville »
20 – Relancer le mot « mi-carême » en déshérence
21 – Des jeux de boule nantaise en plein air, et non confinés
22 – Des échanges de tableaux entre musées de l’Ouest
23 – Organiser des Breizh tours / Tro breiz
24 – Civiliser les permis de démolir, pour une spiritualité laïque de la mémoire des lieux
25 – Une plaque de mémoire sur la prison La Fayette
26 – Favoriser les « Projets d’intérêt collectif » des jeunes
27 – Une Maison des langues et des cultures
28 – Un recensement des hermines sculptées des persiennes et soupiraux
29 – Remonter les halles du Bouffay
30 – Un tirage au sort avec proposition d’excellence : la possibilité de bien faire
31 – Approfondir la mémoire de la traite esclavagiste
32 – Relancer le festival Les Allumées
33 – Une promenade piétonne en bords de Loire de la Fosse à Cheviré
34 – Un vœu contre le fichage des jeunes
35 – Des engagements du Forum international des Droits de l’Homme
36 – Et bien entendu recreuser l’Erdre et la Loire, là où elles ont été comblées !

Cher monsieur Rimbert, c’est aujourd’hui le 31 janvier, dernier jour pour souhaiter les vœux de nouvel an 2013, pleine année civile inaugurale de votre nouveau mandat de maire.

C’est l’occasion pour moi de former 36 vœux pour vous et notre chère ville.


Pourquoi 36 souhaits de bonne année ?


Car il me semble que les deux gauches, la « légitimiste », la « mouvementiste », ont plus que jamais intérêt à s’écouter.


Or l’affaire de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes illustre un schisme grandissant entre ces deux gauches, conforté par d’autres fractures : quand la partie la plus institutionnelle de la gauche prend pour réflexe habituel, sinon exclusif, d’envoyer les forces de l’ordre harnachées et surarmées contre les révoltés des Sans droits, des Sans papiers, et des Sans Toits, ou d’encourager les tactiques déloyales du patronat pour faire reculer le droit social, c’est qu’il y a péril et grand danger moral pour la gauche, notre gauche, celle des enfants de Jean Jaurès et de Fernand Pelloutier.


Pour être clair, je me fais du souci pour la municipalité de Nantes, si elle devait s’enfermer dans une posture extrême à propos de Notre-Dame-des-Landes, sans prendre garde à d’autres projets étourdis qui pourraient eux aussi mettre le feu à la plaine, comme de saccager l’une des plus belles perspectives du monde, en privatisant l’esplanade de Feydeau et de la Petite-Hollande pour y bâtir un énorme et forcément hideux énième centre commercial (dont l’intérêt, s’il sera réel pour les spéculateurs financiers, semble bien faible pour les usagers et pour le commerce du centre ville, dont il ne pourra qu’accélérer la concurrence et la fragilité, dans un contexte de récession.)

Que pouvez-vous faire, monsieur le nouveau maire, pour réduire toutes ces occasions de fractures, là où vous êtes, tout en restant dans le domaine du possible, de la prudence maximale et du raisonnable ? Je me suis modestement essayé à cet exercice typiquement hollandiste et ayraldien avec ces 36 vœux, d’importance très diverses, et livrés tels quels dans un désordre apparent.

En ces temps de « Folle journée », soyons audacieusement modérés et furieusement constructifs, car, s’il est vrai que ce n’est pas cette année que votre parti instaurera le socialisme dont il porte le nom, pourquoi ne pas considérer comme Léon Blum, que les socialistes, lorsqu’ils sont gestionnaires loyaux du pouvoir, doivent au moins arracher au capitalisme régnant le maximum de justice ?

J’écris ces vœux en encourageant les citoyens à remontrer librement leur vœux, sans oublier jamais l’étymologie double du mot « votif » (de qui procède à la fois le « vœu » magico-religieux, et le « vote » rationnel-républicain.)

01 – Étudier une sortie de crise viable pour Notre-Dame-des-Landes (l’option nazairienne)
La querelle de Notre-Dame-des-Landes, ouverte alors que Jean-Marc Ayrault était concerné comme premier élu du département, doit être revue maintenant qu’il est en charge d’un périmètre de gouvernement élargi à toute la Nation.

Si vous voyez un de ces jours Jean-Marc Ayrault, rappelez-lui un certain adage célèbre du duc d’Orléans (grand féodal opposant, qui effectua trois ans de prison après sa capture à Saint-Aubin-du-Cormier en 1488, lors de la grande défaite des Bretons avec qui il s’était imprudemment associé). Devenu par roi par imprévu dynastique sous le titre de Louis XII, « père du peuple », second époux d’Anne de Bretagne, il eut la sagesse de proclamer la réconciliation, l’oubli de toute vengeance personnelle et la continuité de l’État garant de l’intérêt général : « Le roi de France ne venge pas les injures faites au duc d’Orléans ». Il serait bon qu’il en soit de même en 2013, et qu’un premier ministre parisien puisse oublier les passions nantaises pour trouver une sortie élégante au problème de Notre-Dame-des-Landes, en renégociant avec Vinci le contrat d’aéroport.
N’étant pas spécialiste du problème, il me semble qu’une solution technique consisterait peut-être à abandonner définitivement le projet de Notre-Dame-des-Landes, et à aménager l’actuel aéroport de Saint-Nazaire pour recevoir plus de vols, car il possède lui l’avantage d’être déjà opérationnel et convenablement relié aux axes multimodaux (TGV, quatre-voies gratuite, fret maritime et fluvial) et de plus il est déjà doté d’une grande piste accueillante aux plus gros avions. Enfin cela favoriserait l’axe stratégique fraternel entre nos deux villes de l’estuaire. Ceci nécessiterait certes quelques travaux d’adaptation : c’est l’occasion de dédommager à l’amiable à Vinci, qui sera trop heureux de se désembourber du site de Notre-Dame, devenu un symbole international navrant pour son image externe et interne.
Cette option nazairienne n’est peut-être pas la bonne, mais c’est dans cet esprit de recherche imaginative sans tabou qu’on trouvera une solution satisfaisante pour tous.

02 – Un bagad pour une musique municipale
Il n’y a plus de fanfare militaire à Nantes, si bien qu’on doit mettre un disque pour les cérémonies patriotiques. C’est peut-être le moment de créer un bagad municipal capable d’interpréter des airs bretons et non-bretons, traditionnels et contemporains, fonctionnant avec des artistes nantais professionnels et amateurs sur le modèle des pompiers volontaires. Ce bagad municipal serait disponible pour chaque occasion appropriée : cérémonies, réjouissances sportives, accueil de personnalités, ouverture de congrès, jumelages, deuils, etc.


03 – Des cérémonies patriotiques non désertées
On note par ailleurs que les dates telles que le 8 mai ou le 11 novembre perdent leur sens lorsqu’ils ont lieu devant un public désormais très clairsemé. La mairie s’honorerait en facilitant la participation des groupes scolaires avec leurs enseignants.


04 – Un temple laïc dédié à la Résistance et aux idéaux de Liberté-Egalité-Fraternité
Il manque à Nantes un lieu sobre de type halles, à l’abri des intempéries, mais fonctionnant sans aucun frais de gestion ou d’entretien, ouvert à toutes les propositions réfléchies ou spontanées, sorte de théâtre couvert de plein air avec des gradins, voire avec des vitrines d’exposition, dédié aux idéaux de la Résistance, disponible comme lieu de rendez-vous civiques et culturels. Je le verrai bien dans un lieu symbolique en bord de Loire, et il pourrait faire l’objet d’un chantier d’application pour futur ouvriers du bâtiment. La mairie n’aurait qu’à offrir le terrain, dont elle resterait d’ailleurs propriétaire.


05 – Une parade annuelle de toutes les communautés culturelles de Nantes
Cette parade chante et danse, accueille des chars, des fanfares, des bandas, et réunit toutes les langues et cultures, sans repli ethniciste, obscurantiste ou nationaliste : On y voit des drapeaux bretons, kabyles ou tchétchènes, des costumes traditionnels malgaches et thaïlandais, des danseurs de flamenco et des praticiens de la capoïera.


06 – La reconnaissance de la mémoire historique de la Droite nantaise
Il y eut le pire (notamment ces émeutes antisémites dans les rues nantaises pendant l’Affaire Dreyfus), mais il serait sectaire d’ignorer les permanences profondes d’une certaine droite chrétienne de l’Ouest de la France, avec sa propre créativité sociale et culturelle, née lors du grand drame vendéen, et qui sut parfois conserver sa dignité lorsqu’elle fut inspirée par Chateaubriand, Bernanos ou Mauriac. Elle mériterait sa place au Château des ducs.


07 – Une rue du général de la Bollardière
Ce grand résistant sauva l’honneur en sacrifiant sa carrière pour refuser la torture pendant la guerre d’Algérie. Il avait des attaches dans la Loire-Atlantique. Il mérite sa rue à Nantes.

[ Précision du 7 février : En fait, une rue du général de Bollardière vient d’être créée discrètement à Nantes sur un terrain en friche du quartier Beaulieu, à la faveur d’un programme immobilier qui comporte entre autres un ensemble de logements neufs et de bureaux qui ne sera livré qu’à l’été 2013.
Voir : http://www.iledenantes.com/fr/projets/19-operation-beaulieu-ilot-e1.html
Une partie de ce voeu n°7 est donc exaucée ! Mais cette rue est méconnue et reculée, et son baptême n’a pas fait l’objet d’un écho médiatique persistant dans la mémoire collective. Il reste donc à l’inaugurer avec l’éclat que mérite la personnalité de ce grand humaniste non-violent, par ailleurs ancien Compagnon de la Libération, comme l’ont été auparavant le « Carrefour Général-Jacques-Pâris-de-Bollardière », à Paris le 29 novembre 2007, le pont Général Jacques de Bollardière à Montbéliard, le 30 janvier 2009, en présence d’historiens, de personnalités et de collègiens, et la rue Général Jacques Pâris de Bollardière, à Rezé, créée puis inaugurée grâce à un travail de lycéens rezéens en BEP électronique avec leur professeur Laurent Priou,
« émus du fait qu’aucune commune de l’agglomération nantaise n’avait immortalisé le nom de ce grand humaniste pourtant natif du département. L’inauguration eut lieu le 30 mai 2009 » en présence de Simone de Bollardière. Pourquoi pas un monument nantais dédié à ce grand homme ? Inauguré par un premier ministre ? ]

08 – La dignité des mairies annexes
La loi qui imposa sans leur consentement le rattachement de Chantenay et de Doulon à la ville centre était suffisamment exceptionnelle pour qu’il ne soit pas nécessaire de l’aggraver cent ans plus tard. Cette loi a prévu que ces chères vieilles communes continueraient à exister sous la forme de « sections » de Nantes, et qu’elle auraient le privilège de conserver à la tête de leurs mairies préservées (non pas rabaissées au rang de « mairies-annexes » !) des « maires-adjoints » (et non des adjoints au maire). Il serait bon de respecter la Loi, quand même ?


09 – Des statues des enfants nantais Jacques Vaché et Fernand Pelloutier
Il y eut le général de Gaulle, Aristide Briand, Anne de Bretagne. Après Donatien et Rogatien, nos deux « enfants nantais » du début du XXème siècle sont Jacques Vaché et Fernand Pelloutier, qui méritent un hommage monumental dans la cité.


10 – Le rôle politique d’une ville Compagnon de la Libération
Maintenant que Nantes partage avec Paris, Grenoble, Vassieux-en-Vercos et l’île de Sein le privilège et le devoir de perpétuer l’Ordre des Compagnons de la Libération après la disparition des derniers héros de la Résistance, ce rôle ne peut rester purement décoratif et doit donner l’occasion de grandes Campagnes d’éducation populaire, à l’aide d’événements et d’exposition, dédiée à l’actualité brûlante des idéaux de la Résistance.


11 – Favoriser les rencontres entre les Jeunes et les Anciens
Les rencontres organisées entre des jeunes Nantais d’aujourd’hui et d’anciens jeunes témoins de la Seconde mondiale ont prouvé qu’il s’établit alors entre eux un pont direct, profondément formateur et émouvant. Maintenant que la génération des plus anciens s’efface, il faut continuer à solliciter affectueusement la mémoire des Nantais qui ont connu d’autres périodes plus récentes : la guerre d’Algérie, la mémoire ouvrière, les conquêtes féministes et l’accès à la contraception, mai 1968.

12 – Renforcer la lecture de la presse locale au collège et au lycée par des jeux scolaires proposés chaque matin
La ville de Nantes a la chance de disposer d’un groupe de presse locale qui distribue gratuitement chaque matin des centaines d’exemplaires de Ouest-France et de Presse-Océan aux jeunes, en tant que futurs acheteurs et futurs citoyens. Il faut optimiser ce service généreux en mettant en ligne chaque matin des jeux scolaires attestant de la lecture attentive du journal, dotés de prix.


13 – Célébrer le Centre du monde, le centre des terres émergées
On sait (enfin plutôt, on ne sait pas!) que le pays nantais et lui seul se situe au centre du monde, au centre mondial des terres immergées.
Voir à ce propos :
http://lucky.blog.lemonde.fr/2012/08/19/nantes-est-elle-vraiment-au-centre-exact-du-monde-dame-ecoute/
Il serait puéril d’en tirer une quelconque vanité, mais pour l’instant, c’est l’excès inverse qui fait rage. Et pourtant, une fierté raisonnable devrait nous inviter à en faire une occasion d’exemplarité universelle nantaise pour les bonnes pratiques démocratiques, culturelles et sociales.
La mairie pourrait marquer physiquement cette élection géographique en érigeant un monument au Centre du monde, qu’on pourrait installer, pourquoi pas, dans l’une de nos places circulaires, qui ne manquent pas : Royale, Canclaux, Mellinet, Newton, Louis XVI…


14 – Avoir le souci des usagers de Nantes résidant en zone périurbaine
Les sociologues ont repéré la détresse des habitants obligés par contrainte économique de résider dans les lotissements des zones péri-urbaines, avec 20 à 100 km de trajet pendulaire quotidien pour travailler : désenchantement, isolement, désertification culturelle… Ces habitants sont tentés plus qu’ailleurs par le vote extrémiste xénophobe. Or ils sont également usagers de la ville centre, et il faudrait inventer, avec le Conseil général et d’autres partenaires, des politiques entièrement originales qui puissent leur permettre de ne pas se sentir abandonnés.


15 – Usages modernes des transports en commun (1) : multiplier les voies tram-train en étoile
Les travaux publics veulent des commandes pour sauvegarder l’emploi ? Voici un enjeu écologique : ressusciter les voies ferrées qui rayonnaient profondément autour de Nantes jusque dans les années 1930. Le tram-train pour tout le monde, et toutes sortes de pollutions régresseront. Ceci favoriserait l’accès sécurisé de la ville centre pour les jeunes des zones péri-urbaines. L’étalement urbain n’est pas forcément pervers s’il est maîtrisé. (On utilisera également les voies existantes SNCF sous-exploitées comme celle surélevée sur pilotis qui traverse l’Ile de Nantes).


16 – Usages modernes des transports en commun (2) : Multiplier les modes de transports (pont-transbordeur, téléphérique, navibus, draisienne) et les points d’accès (une escale du Navibus à Chantenay)
Les arguments pour le téléphérique et le retour du pont-transbordeur sont connus et pertinents. Il faut juste veiller à ce que leur emplacement ne détruise pas la beauté sobre et exceptionnelle du panorama ouvert vers l’Ouest qui s’offre à partir de la Fosse et de la Petite-Hollande. Quand à l’escale supplémentaire du Navibus à Chantenay, cale Crucy, elle mériterait au moins de faire l’objet d’un trajet sur deux, l’autre restant en ligne directe.


17 – Usages modernes des transports en commun (3) : Promouvoir la condition d’usager par des cadeaux inopinés dans les plate-formes, des animations-dégustations, des invitations à des avant-premières
Il faudrait cesser de considérer les usagers du bus et du tram comme des captifs qui n’ont pas les moyens d’accéder à la reine automobile. Valorisons donc le choix du transport en commun, par des activités embarquées récompensant le civisme écologique de ces usagers : animations-dégustations, service à bord et sur les quais, avant-première de la Folle journée et de l’Opéra, séances de signatures, expositions sous vitrines, etc.


18 – Usages modernes des transports en commun (4) : Faire accéder les lycéens les plus modestes à des tarifs adaptés
C’est un désordre social inaperçu mais lourd de conséquences : chaque matin, des centaines de jeunes nantais font leur devoir scolaire avec la peur au ventre de croiser des contrôleurs, car leurs familles n’ont pas les moyens de payer la carte TAN. Ces jeunes risquent d’arriver en cours, énervés, en retard, perturbés, etc. Il faut cesser d’externaliser ce coût social méconnu sur l’institution scolaire, qui a déjà assez de défis à surmonter.


19 – Favoriser un nouvel usage des cafés et bistrots : le casier-bureau « baise en ville »
Allons-nous laisser disparaître un par un les lieux de sociabilité qui témoignent qu’il peut y avoir une vie à part la télévision chez soi ? Nantes sera pionnière dans un nouvel usage convivial du bistrot, aidé par la mairie : des cafés volontaires proposeront à leurs clients, contre un très modique loyer, l’usage discrétionnaire d’un casier personnel de type vestiaire-consigne dans une arrière salle du café, où l’on pourra stocker son parapluie nantais, déposer ses bagages, ses achats volumineux, son livre accompagnateur, recharger son téléphone et son ordinateur portable pendant qu’on travaille tranquillement à côté, et qu’on donne rendez-vous à ses amis, etc.


20 – Relancer le mot « mi-carême » en déshérence
Nous ne demandons pas grand chose, seulement que le Carnaval nantais retrouve, au moins en sous-titre, son ancien titre de « mi-carême », qui sonne comme un paradis d’enfance et une trêve féerique dans les privations et frustrations de toutes sortes, un mot du lexique nantais qu’il serait triste de laisser mourir.


21 – Des jeux de boule nantaise en plein air, et non confinés
Les efforts louables pour ouvrir la Boule nantaise aux jeunes générations seront contrariées tant qu’elle restera confinée loin des regards, dans les arrières-salles des cafés. Construisons un peu partout des pistes ovales de boules en béton lisse, qu’on pourra utiliser au moindre rayon de soleil, avec des boules accessibles par un monnayeur avec caution.


22 – Des échanges de tableaux entre musées de l’Ouest
Si vous avez visité les musées des Beaux-Arts de Rennes et de Quimper, les sculptures de David d’Angers dans la ville du même nom, vous aimeriez peut-être que les villes de l’ouest se prêtent régulièrement des œuvres.


23 – Organiser des Breizh tours / Tro breiz
C’était une idée nantaise. On fait refaire à Anne Bretagne son fameux Tro Breizh : le reliquaire d’or de son cœur a été promené à travers toute la Bretagne, de ville en ville, par une procession en grand apparat, avec musiques.


24 – Civiliser les permis de démolir, pour une spiritualité laïque de la mémoire des lieux
C’était la proposition n°45 des 102 déjà publiées en 1995 par l’association « Nantes Est Une Fête », et que nous recopions intégralement ici :
« Ce qui doit changer : Là où il va avoir modification irréversible du paysage nantais (construction, démolition de site historique, industriel, archéologique), la mairie disposant des prérogatives de préemption/permis de construire/démolir doit assurer l’information préalable des citoyens par des canaux facilement accessibles, le temps d’un délai de grâce, ceci pour : – donner le temps à la société civile et aux associations de formuler des observations/avertissements/contre-projets, pouvant enrichir l’information des décideurs, étant admis que la décision revient en dernière instance aux élus,- permettre aux curieux, aux mémorialistes, à la presse locale et surtout aux personnes ayant vécu charnellement dans les sites appelés à disparaître, de faire leur travail de deuil et de nostalgie et surtout de transmission de mémoire (contre-exemple : les anciens travailleurs de la brasserie de la Meuse, qui auront été surpris par la récente et imprévue démolition du site).La destruction-par-surprise de sites urbains ne peut jamais être une méthode municipale en démocratie, et reste comparable par sa brutalité envers les plus humbles à une atteinte à la dignité des gens, comme les licenciements-kleenex ou la tragique perte de repères intellectuels et moraux consécutive aux convictions interchangeables des élites télévisées, au zapping-à-surprises du spectacle moderne. »


25 – Une plaque de mémoire sur la prison La Fayette
Il suffira d’imposer au futur promoteur la pose de cette place « Ici s’élevait une prison, à proximité immédiate du tribunal, etc », ce qui donnera sens au maintien de la plaque célébrant l’héroïsme des Résistants nantais du réseau Cohors-Asturies. Il faudrait faire de même sur l’ancienne prison des Rochettes.


26 – Favoriser les « Projets d’intérêt collectif » des jeunes
C’est la sixième des « Dix propositions pour le siècle qui vient / Dekapol »
Voir :
http://lucky.blog.lemonde.fr/2005/09/18/2005_09_decapol_dekapol/
« DROIT A L’EDUCATION POLITIQUE – Droit à des P.I.C. (projets d’intérêt collectif) à l’école. L’éducation à la responsabilité, à l’initiative individuelle ou collective, au travail en petite équipe, ne se transmet plus par les mouvements de jeunesse, tandis que la société de consommation prive les jeunes de la connaissance de leurs propres virtualités créatives et politiques. Il faut que l’éducation par les P.I.C. fasse l’objet d’unités d’apprentissage obligatoires dans les établissements scolaires, afin que personne ne soit citoyen analphabète (apprendre à prendre la parole, à utiliser des ressources documentaires et informationnelles, à monter un projet d’intérêt collectif, à l’évaluer à posteriori, etc.) »


27 – Une Maison des langues et des cultures
C’est un lieu de ressources autogérées, un peu comme une Bourse du travail d’autrefois, comme le Musée de l’Imprimerie, le Centre Gay et Lesbien, la Maison des étudiants. Dans cette « Maison des langues » se réunissent les communautés linguistiques nantaises, grandes et parfois trop petites numériquement pour s’être constituées en associations. Elles disposent d’ordinateurs à claviers multilingues, d’une vaste collection de dictionnaires et de grammaires étrangères, d’abonnements à des journaux. On y dispense des cours de langues et des consultations de toutes sortes. On y pratique le théâtre en langues étrangères et régionales.


28 – Un recensement des hermines sculptées des persiennes et soupiraux
Un grand nombre de maisons nantaises arborent encore ce signe armoricain, qui tend à disparaître avec les remplacement des volets de bois par des panneaux en métal ou en PVC. Les propriétaires doivent être avisés par la mairie que ces humbles témoignages ont une valeur, et qu’il serait dommage de les détruire, puisqu’ils vont être classés au patrimoine local.
Plusieurs enquêtes ont tenté de les recenser, donc celle-ci : « Nantes ville herminée », http://r.bourhis.free.fr/groupederubrique/index.html


29 – Remonter les halles du Bouffay
Peux-t-on laisser rouiller quelque part ces halles qui ont été célébrées par tous les vrais Nantais, y compris par Jacques Demy dans son film Une chambre en ville ?


30 – Un tirage au sort avec proposition d’excellence : la possibilité de bien faire
Le tirage au sort des responsabilités publiques sera à la fois un retour au source de la démocratie occidentale inventée par les Grecs, et la nouvelle frontière d’un renouvellement démocratique indispensable pour le XXIème siècle. Nantes s’honorera en expérimentant avec soin des dispositifs pour que l’expérience ne déçoive pas, notamment en favorisant les innovations ambitieuses qui pourraient être proposés par les personnes tirées au sort.


31 – Approfondir la mémoire de la traite esclavagiste
Après la récente construction du Mémorial, Nantes n’en a pas fini avec le balancement tragique entre bonne et mauvaise conscience. Car il va falloir maintenant regarder en face un scandale dans le scandale : la longue continuation à Nantes d’une traite « interlope » après 1817, d’autant plus criminelle qu’elle était désormais universellement proscrite et considérée comme barbare. Nantes devra également financer une bourse d’études historiques évaluant les retombées concrètes des bénéfices en France des réparations financières imposées à la jeune république d’Haïti pour son émancipation. Par ailleurs, la ville devra prendre sa responsabilité dans le débat sur l’éventuelle construction d’une réplique de bateau négrier, qui posera forcément un problème éthique : Qui dit bateau, dit forcément un usage de navigation, donc de plaisance. Or que dirait-on de l’implantation d’une fête foraine sur le site d’un camp de concentration nazi ? Tout n’est pas permis au nom d’une commémoration doloriste, victimiste, voyeuriste et spectaculaire. Il vaut beaucoup mieux célébrer le génie admirable des peuples noirs dans leur expression culturelle, musicale et linguistique, et dans leurs actes de résistance à l’oppression (républiques de fugitifs, marronnage, etc).


32 – Relancer le festival Les Allumées
Vingt ans plus tard (1990-1995), on n’a jamais retrouvé une telle créativité populaire, audacieuse, mais partagée par toutes les couches de la société nantaise. Et dire que cet événement annuel ne coûtait guère en subventions qu’un à deux millions tout au plus de nos actuels euros !


33 – Une promenade piétonne en bords de Loire de la Fosse à Cheviré
Alors que l’accès au bord de l’Erdre fait grand débat, alors que la Communauté urbaine a doté toute la rive sud (notamment de Pirmil à Trentemoult) d’une belle promenade pour laquelle on a exproprié sans faiblir les riverains, les Nantais qui veulent se promener au delà du Maillé Brézé se heurtent vite à des implantations privées (pour l’essentiel des anciennes usines désaffectées ne requérant plus l’accès au fleuve), et ceci jusqu’à Saint-Herblain. Alors qu’il serait si agréable de pouvoir marcher librement le long de cette rive exposée au soleil, et de bénéficier des guinguettes et animations terrestres ou nautiques qui ne manqueraient pas de s’y installer. (On regrettera ici que l’atelier « Déplacements doux » du Comité consultatif de quartier Chantenay-Bellevue, où j’ai siégé comme « tiré au sort » n’ait jamais pu débattre et proposer cette option.)


34 – Un vœu contre le fichage des jeunes
Dans la plus grande discrétion, depuis le septennat de monsieur Sarkozy, les jeunes scolarisés sont dotés d’un « identifiant national éléve » et sont soigneusement fichés sur leurs acquisitions de compétences, mais aussi sur leur profil psychologique et leurs options politiques. On sait que le risque d’interconnection des fichiers risque de violer leur droit à la vie privée et à l’oubli des petites erreurs d’enfance, et que les employeurs pourront bénéficier de l’accès à ces « CV forcés » pour précariser les salariés et briser les protections collectives. La ville de Nantes s’honorerait en votant un vœu invitant le nouveau gouvernement à renoncer à ce dispositif effrayant, à informer les parents qu’ils peuvent refuser de laisser ficher leurs enfants (pour une durée de 30 ans!), à interdire que ce fichage soit effectué avec des matériels informatiques fournis par les collectivités locales (en prenant contact pour y associer le Département et la Région, tutelle des collèges et lycées.)


35 – Des engagements du Forum international des Droits de l’Homme
Depuis 2004, ce forum tenu à Nantes a permis la rencontre de nombreux acteurs internationaux des Droits de l’Homme. Mais il doit être doté de moyens et d’ambitions accrus pour pouvoir devenir un véritable acteur politique des droits de l’homme, respecté comme tel, capable d’interpeller les pouvoirs ici et ailleurs, de proclamer des Déclarations, d’engager des enquêtes et travaux suivis, de maintenir une veille réelle entre deux forums, séparés par deux ou trois années.


36 – Et bien entendu recreuser l’Erdre et la Loire là où elles ont été comblées ! Afin de réparer l’une des plus vilaines atteintes à la beauté, à la fonctionnalité et à l’esprit des lieux.
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Je vous souhaite, monsieur le maire, avec mes meilleures salutations, une bonne réception de ces vœux forcément imparfaits et incomplets, en espérant qu’ils puissent être utiles ou donner des idées, raison pour laquelle je les publie ce soir sur mon weblog.


Luc Douillard